Le travail de Laurent Grasso, protéiforme, décline des environnements à la temporalité trouble qui amène le regard du spectateur à s’interroger sur la vérité même des formes qu’il perçoit. A l’intérieur de l’œuvre, le temps se contracte et se dilate, entre anticipation et archéologie du passé, Laurent Grasso produit des dispositifs qui induisent une perception simultanée et incohérente du temps.

Jouant sur la vérité historique et documentaire des images qu’il manipule, l’œuvre renvoie à la fois au familier, au connu en même temps qu’elle amène le regard à un point de fracture du réel, une abyme qui, dans sa progression silencieuse, absorbe le regard dans une réalité parallèle. Ainsi, à la manière d’un historien des images, Laurent Grasso réactualise l’iconographie des Grandes découvertes depuis la Pré Renaissance aux avancées scientifiques du XIXe siècle pour en exploiter le potentiel fictionnel. La poussée au seuil du virtuel et du merveilleux que génèrent ces œuvres, inscrit le geste de l’artiste dans une filiation avec des époques où l’art, la croyance, la connaissance, la science semblaient inextricablement liées. Ces mystérieux soulèvements de la nature, tantôt considérés comme manifestations divines, hallucinations, phénomènes paranormaux, catastrophes naturelles : éclipses, nuées ardentes, météorites, que Laurent Grasso transpose tels des leitmotivs obsessionnels, questionnent notre sens de la réalité dans sa relation à l’histoire de la technique.

Entre fascination et inquiétude, onirisme et rigueur documentaire, jeux de court-circuitages temporels, les œuvres de Laurent Grasso, semblent vouloir restaurer la mémoire des choses disparues, des croyances et des représentations qui ont modelés l’histoire de l’homme pour mieux interroger notre degré de présence au monde actuel, où la science et la technologie, machines de raison, semblent faire si peu cas du mystère et de l’obscurité.

Clara Guislain

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